Sunday 5 November 2017

Moments sucrés, moments sacrés

Sur tous les murs, des pans de notre histoire et les regards bienveillants de nos ancêtres. Ceux-là mêmes qu'on a autrefois appelé coolies, marrons, esclaves, ceux-là mêmes de qui nous sommes issus. Je la vois bien toute cette souffrance qu'ils ont su garder enfouie au creux de leur être mais je ne peux m'empêcher de poser sur eux un regard amusé, attendri et parfois ému. Nos angoisses et nos craintes semblent si petits comparés aux leurs, ancrées dans une époque tellement lointaine qu'elle nous semble presque abstraite.Nous avançons dans cette salle pendant que l'histoire de la canne se révèle à nous au gré de nos pas et je tombe sur une photo de mon frère. Il fait désormais partie des lieux, de cet antre qui relie le passé à l'avenir et je prends soudain conscience qu'il est un maillon dans cette chaine qu'est l'histoire de notre pays. A ce moment je suis content de ne pas être là ,seul, debout à prendre sa photo, je suis soulagé de t'avoir à mes côtés. Qui sait, seul, je me serai peut être senti défaillir, absorbé par l'âpreté des lieux et sa présence?

A l'extérieur, le soleil a un parfum de fangourin, il est doux et caressant. La musique sillonne les allées et pénétre nos corps. Nous nous asseyons tantôt dans un wagon, tantôt sur l'herbe sèche et nous imprégnons de ce lieu éclectique où tout le monde semble s'y retrouver, ce coin qui ressemble étrangement à un grand foyer et où l'on se sent forcément un peu artiste. L'air me chuchote cette phrase étrange et vivifiante à l'oreille: 'Tu es dans le vrai. Tu es dans le bonheur.' Je m'allonge, je ferme les yeux, je sens mon coeur souple et agile et je n'ai comme seule envie de ne plus jamais les rouvrir. Tu es là avec moi et autour de nous, nos aieux, nos héritages, nos compatriotes, notre peuple, la nature, la culture, la musique. Sur notre langue le goût du rhum, ce vieux goût de notre pays que tu as testé pour la première fois en riant les yeux fermés. Moment d'anthologie: l'espace de quelques secondes je t'ai dévergondé, toi, le garçon sage à la chemise lisse.Nous venons, vois-tu, nous aussi d'écrire un pan de notre histoire, de cette petite histoire d'amitié qui nous lie depuis un peu plus de deux ans et qui durera le temps qu'elle devra durer.

Douze petites minutes

Quatre rues séparent ma maison de C hez Ram où trois pains maison chauds chauds  m'attendent tous les matins. Cinq minutes à pieds pour ...