Il y a des jours avec, il y a des jours sans.
C'est ma semaine sans.
Je repense à tous ces moments où j’ai joué à quitte ou double avec ma vie
sentimentale, aux risques stupides pris dans l’humeur du moment, au nombre de
fois où je me suis jeté dans le vide et cassé la gueule, où à force de surenchère
et de grandiloquence tout est subitement parti en vrille. J’ai forcement le
spleen aujourd’hui, un vague à l’âme accentué depuis que j’ai entre-aperçu mon
ex samedi dernier et me suis retrouvé dans l’obligation d’entamer une
conversation polie avec Simla le même soir en allant rendre visite à mon oncle.
Beaucoup d’émotions refoulées - et inutiles - à gérer. Trop, probablement, pour
le doux rêveur que je suis. C’en est presque honteux que de permettre à ce
reflux vénal de venir troubler ma quiétude. Pire ! Voilà que tout cela prend des allures d’autodérision aujourd’hui
que les règles que je m’étais imposées sont en train d’être outrepassées. Seul
et unique coupable ; ce cœur d’artichaut qui me donne tant de fil à retordre.
J’ai appris que l’époux de Vimla (une ex-petite amie) est décédé. Il est
tombé du toit de sa maison. Est-ce normal que cela me déprime autant ? Je
ne le connaissais pas personnellement, mais je souffre pour elle.
King et Amal m’ont appelé la veille de Divali, ils veulent que le groupe se
réunisse autour d’un verre. Cela fait 24 ans depuis notre dernière rencontre. Pourquoi
maintenant? Y a-t-il cette appréhension que demain sera trop tard ? Pourquoi
une telle urgence ? N’aura-t-on pas vécu et tremblé les uns sans les
autres malgré une promesse faite sur un banc dans la chaleur d’une nuit d’Octobre
à Port Mathurin ? Ils disent qu’ils veulent revoir les photos de Rodrigues
et ils savent que je suis le seul à les avoir. De cette bande de potes,
combien de rescapés ? Combien d’épaves émotionnelles ?
Plus de vingt ans me sépare de la personne que je fus, de mon identité de l’époque.
C’est en terrain miné que je risque de m’aventurer si on se revoit mais au fond
ai-je vraiment le choix ? Ne pas y aller serait comme refuser de valider
la personne que je suis devenu aujourd’hui. Je ne me suis jamais prêté à ce
genre d’exercice et cela me fera bizarre de faire le bilan de ma vie comme ça,
l’espace d’une rencontre. Cela me fera certes plaisir de les revoir tous mais quelles informations
filtrer ou censurer devant des personnes qui ont été si loin, si longtemps ?
mais bon, pour être tout a fait honnête, il est evident qu'à l’approche de ce rendez-vous l’excitation prendra le
dessus sur l’appréhension.