Friday 5 May 2023

Jeunesse savait, vieillesse peut.

En rentrant à la maison l'autre soir, j'ai pensé à avant, à ces deferlements de petites reflexions toutes bêtes qui habitaient mon esprit. Oui, je l'avoue, j'ai repensé à cet avant et à la complexité d'être jeune et à se croire vaillant, courageux et aussi à comment j'avais orchestré mon monde autour d'une perpetuelle fuite vers l'avant sans savoir pourquoi. Aujourd'hui encore, l'énigme reste entier. Il fallait avancer,  juste avancer, toujours avancer, ne jamais s'arrêter.

La petite mémoire de cet avant pâlit. Je n'ai plus envie de ces rires d'antan, de cette frivolité et de cette candeur qui me collaient des couleurs aux joues. Tout cela avait trouvé leur place bien au chaud dans une case. Tout y était dans cette grande commode étiquetée "Ordre établi des choses". Mais tout ça c'était  avant qu’advienne le point de bascule. Il fallait que ce soit. Ainsi, il en a été. 

Je savais qu'un jour minuit sonnerait et que dès lors que le sort se mettrait à inverser la mécanique bien huilée de ma vie, c'en serait fini de ma jeunesse. Ce moment fatidique arriva alors que je remontais une rue de la capitale un jour et sentis tout-à-coup mes jambes fléchir et peiner à avancer. C'était un jour tout bête, une date anecdotique dans le calendrier, un après-midi sans saveur. Telle une maîtresse déçue, ma jeunesse me quittait dans cette rue bruyante et s’en allait sans se retourner, même pas pour un dernier au-revoir. Au début on a toujours un peu de mal à saisir les nuances de cet abandon, puis on s'y résigne. Ainsi va la vie.

Désormais, il y a aujourd'hui et aujourd'hui est amplement suffisant. L'énergie que je déploie n'imbrique ni ambition, ni besoin de bien matériel, ni plan d'avenir. Elle se recycle et me suffit à mener une vie simple, sans fla-fla, sans chichi mais avec une belle palette de couleurs. Je suis enraciné dans cette terre qu’est mon île, je l’ai toujours été et je le serai toujours. Mes branches portent un seul et unique fruit à la saveur de sérénité et cela me remplit de plénitude. Ainsi soit-il.



Douze petites minutes

Quatre rues séparent ma maison de C hez Ram où trois pains maison chauds chauds  m'attendent tous les matins. Cinq minutes à pieds pour ...