Thursday 15 September 2022

Début des années 90

So, I found this autobiographical piece on a sheet of paper in a book. A look at my handwriting, this must have been penned in the late nineties.

Je m'en souviens comme-ci c'était hier. Assis sur la banquette arrière d'un autobus récalcitrant qui peinait à avancer sur la montée de Floréal menant à Curepipe, je contemplais la matinée grise et tiède à travers la fenêtre, le coeur battant un peu plus fort que d'habitude, une angoisse me faisant à chaque fois avaler de grosses boules de salive. C'était un dimanche de fin d'avril où l'été commence déjà à tirer sa révérence, je n'avais pas 20 ans et je m'en allais à la rencontre d'un groupe de jeunes randonneurs.

Un peu plus tôt dans la semaine j'étais tombé sur une annonce dans le journal et le nom du groupe m'avait quelquepeu interpellé: Miami Boys. Faire le rapprochement entre cette ville de l'Est des Etats-Unis et notre petite ile m'avait semblé incohérent et pour dire vrai j'avais même trouvé ce nom un peu grotesque.Qu'importe, moi, tout ce qui m'intéressait c'était de sortir voir de nouvelles têtes et oublier que ma vie, à cette époque, ne ressemblait qu'à une sombre histoire de rien du tout. Je me souviens même assez clairement de ce qui avait déclenché le déclic en moi pour me pousser à me rendre à ce rendez-vous devant le bureau de poste; la veille j'avais entendu les paroles d'une chanson de Madonna qui disaient:" Take a day out of life" et cela m'avait inspiré. Se permettre une journée hors de son quotidien, cela paraissait tout à fait attrayant comme perspective. 

Pas grand monde au rendez-vous; une ou deux personnes aux regards fuyants et qui semblaient aussi hésitants que moi à entamer la conversation. Ma montre indiquait 07H30, pile à l'heure et je me disais que les autres n'allaient certainement plus tarder à arriver. Je me grattais un peu nerveusement la tête me demandant quelle attitude adopter devant des personnes inconnues lorsqu'une voix grave et riante me sortit de ma réflexion: "Twa ci to dan groupe?" A côté de moi se tenait un grand gaillard, plutôt rondelet au sourire fraternel et généreux. Je lui répondis que j'étais là suite à l'annonce parue dans le journal et que je ne connaissais encore personne et à son tour il se présenta comme Shanawaz et me serra la main certainement avide de se faire un nouvel ami. Il tint à me rassurer que toutes les personnes du groupe étaient sympathiques et que le chef d'orchestre qui menait un peu  tout le monde à la baguette s'appelait Reza. La conversation à peine débutée, voilà que le Reza en question fit son apparition et que mon copain de quelques secondes me laissa sur place pour se diriger vers lui avant de se retourner un peu penaud, se rappelant tout à coup ma présence pour me lancer: "Vini, ala Reza la". Je m'approchais afin de dévisager ce jeune homme frêle, voire maigrichon occupé à bavarder avec quelqu'un. Dans le décor une petite foule avait commencé à s'amasser.

Lorsque les présentations furent faites, Reza me regarda fixement et longuement avant de me souhaiter la bienvenue dans le groupe. A cet instant précis, j'étais fort loin de me douter que le destin allait nous lier dans une relation amicale des plus tortueuses et éreintantes pour les années à venir. Même aujourd'hui avec du recul je réalise que Reza reste le personage le plus complexe et bourré de contradictions jamais rencontré dans mon existence. Le décrire comme 'bizarre' était certainement injuste de ma part et je l'ai regretté plus tard.

Quant à l'individu avec lequel Reza conversait, il était vêtu d'une façon pour le moins surprenante à mes yeux. Il portait une salopette blanche avec des rayures noires, exactement la même dont Vanilla Ice, rappeur au succès éphémère, s'était accoutrée dans Ice, Ice baby. Je devais être assez coincé à l'époque car je n'avais  jamais imaginé que quelqu'un puisse s'habiller de la sorte à Maurice. Ce jeune homme souriait et laissait apparaitre des fossettes. Il portait du parfum (pas du déodorant mais bel et bien du parfum) et cela me troubla. Lorsqu'il se mit à parler, il le fit avec un charme presque calculé, ce qui déclencha en moi la pensée qu'il devait être l'archétype du mec au sourire dévastateur auquel aucune fille ne résistait. Cela me frappa et sur le moment je pris conscience que j'étais debout là, sous les arcades Salaffa, dans la tièdeur d'un dimanche matin d'avril face à un cliché, un vrai, grand cliché et cela me fit presque pouffer de rire. C'était déconcertant et intéressant à la fois. Il s'appelait Kiran, il avait un regard plein de malice. Lui, allait quelques mois plus tard, commettre l'acte le plus surréel et improbable du monde, celui-là même qui changerait le cours de ma vie à tout jamais...

 

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