Thursday 29 September 2022

Remembering places

L'assaut des émotions face à un souvenir olfactif se produit en moi dès lors que je me retrouve dans le rayon des produits de lessive au supermarché. Le temps se fige et je me retrouve immédiatement projeté dans ma tête dans ce lavomatique au rez-de-chaussée du Barbican Hostel à Londres. Inlasablement mes sens me ramènent à 1998, l'année de toutes les explorations.

Si mon aujourd'hui est relié à ce hier, à ce passé si vrai, si réel, c'est parcequ'il m'a offert une immensité sans mesure où, bonheur après bonheur, je me suis construit. J'étais innocent et friable et sans doute trop occupé à m'emerveiller d'un rien pour me laisser distraire par le cynisme des autres. Même mon imaginaire, pourtant fertile, ne m'avait préparé à ce que j'allais vivre. Dans ce temps ralenti du mois de juin 1998 tout me semblait doux et palpable. Il y a des vies qui passent sans que rien ne s'y passe, il y en a d'autres où le bonheur étoffe chaque chapitre.

Visiter un lieu où les bruits au petit matin sont différents, observer les gens se précipiter vers un métro le visage fermé et en ressortir comme abasourdis, parcourir des endroits où les odeurs ne sont pas celles d'une ile tropicale mais d'une ville moderne, le parfum du croissant chaud et du café brûlant émanant d’un bistrot, goûter à des herbes fines dont on ne connaissait même pas l’existence sont autant de révélations pour des sens inhabitués.

Et puis, il y a la balade dans des lieux improbables, où à un coin de rue on tombe sur une ancienne bâtisse (jamais vieille, toujours ancienne) et on en touche les mûrs dans l’espoir qu’une histoire nous soit transmise tel un électrochoc comme dans les films. Les pierres parlent. Tout autour de soi les gens glissent dans le bleuté du jour. Ces endroits attirent du monde, attirent LE monde vers leur sein nourricier comme pour les abreuvoir de sensations. Nos yeux se referment sur leurs paupières devinant les gloires et les troubles que ces abris ont jadis engendrés. Tout est bref et vif. Et ainsi de suite, on passe d'un site à un autre, toujours prêt à recommencer le même exercice vibrant.

Il y a bien un pont qui relie mes émotions d'aujourd'hui à celles d'antan. Les significations du présent ne sont certainement pas les mêmes de celles d'hier et c'est tant mieux. On a grandi entretemps, d'autres perspectives se sont offertes à nous, ont croisé nos routes, d'autres douleurs aussi, comme celle de vieillir et la frayeur que ces mêmes souvenirs s’estompent trop vite. Rien n’est jamais perdu pour autant. Il me reste l'espoir d'en fabriquer d'autres, avec cette fois à mes côtés quelqu'un qui porte déjà en lui la même curiosité et le même sourire d'émerveillement que je portai à son âge. Chaque couche de l’existence offre son lot d’intensité.Voyager ce n'est pas voir les choses, c'est les vivre.



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