Mon cadeau d'anniversaire

J'ai rendu une visite à chacha Kresh ce matin. Cela faisait un moment que je voulais le voir, lui parler, le toucher. Cet homme autrefois si jovial et vivant n'est plus que l'ombre de lui-même au crépuscule de sa vie. Depuis le décès de sa fille ainée l'année dernière, il parle à peine, si ce n'est avec un regard blafard et mélancolique qui semble dire: "Oh toi la vie, moi qui ai été si bon et vertueux, si droit et respectueux, pourquoi m'accables-tu de tant de chagrin?"

Il a souri pourtant aujourd'hui en me voyant, d'un sourire faible mais sincère et cela a été mon plus beau cadeau d'anniversaire. Quand j'avais dix ans,cet homme me faisait m'asseoir sur le canapé et me lisait le Reader's Digest en décortiquant chaque phrase, afin de m’aider à améliorer mon anglais. Il avait une grande estime pour mon père et  m'invitait souvent à sa table autour du repas familial. Je le voyais inculquer des valeurs profondes à son fils qui, enfant, était mon meilleur ami. 

Comme tout homme, il avait des défauts et en l'observant je finissais par comprendre quels seraient les choix à faire en grandissant, comment ne pas commettre ces mêmes "erreurs d'homme". Il a été une figure paternelle de par ses actions, bonnes et parfois moins bonnes, toujours humaines. On veut tous ressembler à son père et paradoxalement on veut tous s'éloigner le plus possible de l'image du père.

Il fallait que je lui rende visite et que je le serre dans mes bras histoire de lui faire sentir que j'avais appris de lui, que j'avais retenu ses leçons. Il fallait qu'il sache qu'il avait compté et qu’il m’a aidé à me construire en tant qu’homme.